Sigma Geminorum (σ Gem) est une étoile binaire spectroscopique de type RS CVn située à environ 38 parsecs (125 années-lumière), bien connue pour ses variations photométriques et spectroscopiques causées par l’activité chromosphérique intense et les taches stellaires de sa composante principale, une géante de type spectral K1III. Le système possède une période orbitale de 19,6 jours et une excentricité faible de 0,014, indiquant une orbite presque circulaire. La vitesse de rotation projetée (v sin i) de l’étoile principale est d’environ 27 km/s, ce qui correspond à la composante de la vitesse de rotation visible depuis la Terre, dépendante de l’inclinaison de l’axe de rotation. Avec une magnitude apparente d’environ 4,2, σ Gem est facilement accessible aux observateurs amateurs équipés pour la spectroscopie à haute résolution (HR). Nous avons sélectionné cette étoile pour une campagne d’observation STAROS projects, afin de suivre ses variations spectrales, étudier son activité chromosphérique et, profiter de cette occasion pour redéfinir les paramètres orbitaux du système binaire à partir de nouvelles mesures de vitesses radiales.
https://sigmagem.staros-projects.org/
Dans cette campagne STAROS, nous analysons des observations spectroscopiques continues de l’étoile binaire de type RS CVn, σ Gem (HD 62044). Ce système a été classé comme binaire spectroscopique à une seule raie par Herbig & Spalding (1955). La détection du compagnon secondaire a été réalisée par interférométrie optique à longue base en 2015 (Roettenbacher et al.).
L’étoile primaire, une géante K magnétique, est particulièrement bien étudiée. Elle présente toutes les caractéristiques typiques des binaires RS CVn : fréquentes éruptions (par ex. Brown & Brown 2006 ; Huenemoerder et al. 2013), activité chromosphérique (par ex. Bopp et al. 1988 ; Montes et al. 2000), ainsi que des variations de luminosité dues à la présence de grandes taches stellaires (par ex. Oláh et al. 1989 ; Henry et al. 1995 ; Kajatkari et al. 2014). Ces taches froides à la surface ont également été cartographiées grâce à des techniques d’imagerie Doppler (par ex. Hatzes 1993 ; Kovári et al. 2001). Par ailleurs, Roettenbacher et al. (2017) ont étudié en détail la structure de surface de σ Gem en combinant courbes de lumière, imagerie Doppler et interférométrique.
Seules quelques campagnes d’observation continue de l’évolution des taches à sa surface ont été publiées. La première, menée par Kovári et al. (2001), portait sur l’évolution des taches au cours de 3,6 rotations stellaires entre 1996 et 1997. Cependant, les auteurs n’ont pas pu caractériser clairement l’évolution des taches ni la rotation différentielle, attribuant cela à un possible effet masquant lié à l’évolution rapide des taches. Une réanalyse de ces données par Kovári et al. (2007) a permis de détecter une faible rotation différentielle de type anti-solaire, où les régions polaires tournent plus vite que l’équateur. Une autre campagne, publiée par Kovári et al. (2015), a réanalysé les observations de 1996–1997 ainsi que de nouvelles données de 2006–2007, confirmant à nouveau la rotation différentielle anti-solaire. Plus récemment, Korhonen et al. (2020) ont étudié l’évolution des taches et la rotation différentielle de σ Gem à partir de photométrie large bande et d’observations spectroscopiques continues couvrant 150 nuits, mettant en évidence une rotation différentielle marquée de type solaire.
Pour déterminer les paramètres orbitaux de σ Gem, nous avons utilisé un ensemble de 58 spectres validés issus de la base de données STAROS. L’analyse a été réalisée à l’aide de la librairie SpectroBinaryStarSystem, que nous avons légèrement modifiée afin de permettre la mesure des vitesses radiales (VR) sur plusieurs raies pour chaque spectre.
Plus précisément, nous avons exploité la raie Hα située à 6582.82 Å, ainsi que deux raies du fer localisées respectivement à 6581,2 Å et 6663,446 Å. Les barres d’erreur associées aux mesures de VR correspondent à l’écart type calculé entre les trois mesures obtenues pour chaque spectre.
Noter que la librairie SpectroBinaryStarSystem repose sur la librairie open source BinaryStarSolver https://github.com/NickMilsonPhysics/BinaryStarSolver https://arxiv.org/abs/2011.13914
Chaque spectre a été normalisé et les raies telluriques ont été soigneusement retirées à l’aide du logiciel ISIS.
Il est important de noter qu’à ce stade, nos résultats présentent encore une incertitude significative. En effet, nous ne couvrons pas encore la phase où la vitesse radiale atteint son maximum, ce qui limite la précision sur la mesure de l’amplitude K, et nous avons un trou dans la couverture de phase entre 0,4 et 0,6.