Dans Star’Ex il y le mot “Star” pour étoile et “Ex” pour exploration… Alors explorons ! J’ai souhaité changer de domaine spectral pour aller voir comment se comporte le spectrographe haute résolution du coté de l’UV. Plus précisément autour des raies H & K du Calcium situées respectivement à 3968.470 et 3933.663 angströms.
Ce changement de domaine spectral est déjà un petit challenge en soi pour plusieurs raisons mais pour corser un peu l’expérience je me suis dit qu’il serait sympa d’en profiter pour faire un peu d'astrophysique. Objectif : détecter l'activité chromosphérique d'étoiles froides et estimer leurs distances à l’aide de l’effet Wilson-Bappu.
Lunette SkyWatcher 72ED f/5.9 + Sprectrographe Star’Ex (2400 tr/mm + 80/125 + fente de 10 microns) + ASI 183MM Pro
Dans les étoiles froides de type spectral G, K et M, les spectres hautes résolution montrent un étroit pic en émission au centre des raies de Fraunhofer H & K. Raies du calcium ionisé une fois situées dans la partie violette du spectre. Ces raies en émissions reflètent l'activité chromosphérique des étoiles. En effectuant un suivi de ces émissions dans le temps il est possible de détecter des événements ponctuelles (taches, flares etc.) ou encore de mettre en évidence la présence de cycle sur le plus long terme à l'instar de notre cycle solaire de 11 ans.
En 1957, l'américain O.C. Wilson et l'Indien M. K. Vainu Bappu ont découvert une corrélation entre la largeur de ces émissions et la magnitude visuelle absolue de l'étoile permettant donc de déduire très facilement une première approximation de la distance des étoiles froides. Approximation car en plus du risque d'erreur sur la mesure, le facteur d'erreur sur la magnitude absolue est d'environ 0.5.
La relation Wilson-Bappu (WBR) adoptée est une version recalibrée de 2013 (Sunkyung Park et al 2013 AJ 146 73)
$$ Mv = 33.76 - 18.08 log(W_0) $$
Source: S. Park et al, 2013 AJ 146 73
La mesure de la largeur de l’émission au coeur de la raie K est effectuée comme sur l’illustration ci-contre.
La valeur obtenue doit être corrigé de l’élargissement instrumental en faisant :
$W = \sqrt{W^2_{measured} − W^2_{instrument}}$ Avec $W_{instrument} = \frac{\lambda}{R}$
J’ai adopté ici une résolution $R=15000$ On repasse ensuite en km/s en faisant
$W_0 = \frac{\Delta\lambda}{\lambda_0} \cdot c$
J’ai rencontré plusieurs obstacles de ce coté-ci du spectre avec Star’Ex. Compte tenu de mon rapport f/d (=5.9) et de la formule optique du spectro plutôt optimisé pour une rapport f/d 10, le chromatisme se fait bien sentir ici. Impossible d’avoir tout le spectre correctement focalisé. Il faut trouver un compromis. J’ai choisi de faire la mise au point au niveau des raies du calcium et de sacrifier la résolution de part et d'autres de ces raies. Autre point de blocage, la calibration… Impossible avec mon système de lampe néon + fibres. Pas assez de flux pour faire sortir les timides raies de l’argon de l'ampoule néon. J’ai donc bricolé avec vielle ampoule à économie d’énergie (émettant quelques raies de vapeur de mercure) associée à 4 fibres optiques. Malheureusement seulement deux raies visibles sur mon spectre et un peu trop sur la droite pour qu’elles soient bien focalisées. Bilan : la calibration a été effectuée avec un polynôme de dispersion d’ordre un. C’est vraiment pas parfait mais au moins mon boitier de calibration m’a couté zero. Je ferais mieux pour les prochains essais.
Raies K & H du calcium. Spectre lors du réglage du spectro sur table à la lumière du jour pour centrage et mise au point de la caméra science.
Afin de valider le fonctionnement de Star’Ex dans ce domaine spectral, j’ai commencé par quelques étoiles brillantes : Vega, Deneb et β Lyr. Le résultat est sympa mais on voit déjà que le rapport signal bruit n’est pas constant, il est bien meilleur en allant vers le rouge. J’ai un peu du mal à évaluer la résolution des mes spectres en l’absence de raie tellurique… A vu d’oeil je dirais environ 15000 ?